Point n’est besoin de rappeler qu’en droit le contreseing n’est pas à confondre avec la signature conjointe. Si pour le contreseing il n’y a qu’une seule autorité qui est titulaire de la compétence et par conséquent signataire de l’acte, par contre dans la signature conjointe il y a deux autorités qui sont titulaires de la compétence.
Dans ce cas, l’acte n’est régulier que lorsqu’il est signé par deux autorités qualifiées. Chacune n’ayant aucun pouvoir personnel et ne pouvant exercer seule cette attribution.
Dans le contreseing, le contresignataire ne vient que pour endosser la responsabilité politique de l’acte. Un acte qui est, d’ailleurs, régulier de par la seule signature de son auteur.
En RDC, il existe la signature conjointe entre le Président du sénat et le Président de l’Assemblée nationale. Celle-ci intervient lors de la convocation du parlement en congrès. Il est question dans ce cas d’un transfert de compétence.
Mais dans le cas du contreseing du Premier Ministre (Art. 79 de la constitution), celui-ci a pour objectif de transférer la responsabilité politique de l’ordonnance signée par le Président de la République au Premier Ministre qui lui est chef du gouvernement.
Ce dernier engage donc sa responsabilité politique (individuelle et collective) devant le parlement. Et ce contreseing ne transfert nullement la compétence.
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Formats de signature et différence entre régime d’intérim et délégation de pouvoirs
- Le format de la signature conjointe:
« Le Président de l’Assemblée nationale,
Le Président du sénat ,
Vu la constitution,
Vu le règlement intérieur du congrès,
Vu…
Décident: »
- Le format du contreseing:
« Le Président de la République,
Nom complet:
Pour le Premier ministre,
Nom complet: »
En droit positif congolais, le régime d’intérim d’un Premier ministre est uniquement prévu par l’article 16 de l’ordonnance n°20 du 23 mars 2020 portant organisation et fonctionnement du gouvernement, modalités de collaboration entre le gouvernement et le Président et entre les membres du gouvernement.
« Le Vice Premier Ministre assume l’intérim du Premier Ministre en cas d’empêchement«
L’intérim prévu par cet article, n’est pas à confondre avec la délégation de pouvoirs prévue à l’article 9 de la même ordonnance.
Si dans la délégation, le délégué ne peut poser les actes que dans la limite des pouvoirs lui délégué dans l’acte de délégation, l’intérimaire par contre pose les actes qu’auraient dû poser le titulaire du poste s’il n’était pas empêché.
Ainsi, si l’acte de délégation doit faire l’objet d’une publicité, la seule réglementation de l’intérim suffit pour qu’il produise les effets.
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Quelle est la nature juridique des actes posés par un Vice-premier ministre assumant l’intérim d’un Premier ministre?
En temps normal un Vice-premier ministre ne pose que les actes relevant de ses attributions. Mais lorsqu’il assume l’intérim, ses actes agissant comme Premier ministre ont la même nature juridique et la même place dans la hiérarchie que s’ils émanaient du Premier ministre.
Le Vice-premier ministre dispose en outre de l’intégralité de pouvoirs attachés à la fonction dont il assure l’intérim.
C’est ainsi qu’il signe ou contresigne dans les formes précises les actes qui auraient dû l’être par le Premier ministre (Art.79 et 91 de la constitution).
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Quelle est la pratique congolaise sur le contreseing d’un Vice-premier ministre assumant l’intérim d’un Premier ministre?
Dans un passé récent, alors que le Premier ministre, Bruno Tshibala était en mission, le Vice-premier ministre et ministre de transport, José Makila a donc contresigné plusieurs textes juridiques dont deux ordonnances-lois:
- Ordonnance-loi numéro 18/003 du 13 mars 2018 Fixant la nomenclature des droits, taxes et redevances du pouvoir central,
- Ordonnance-loi numéro 18/004 du 13 mars 2018 fixant la nomenclature des impôts, droits, taxes et redevances de la province et de l’entité territoriale décentralisée ainsi que les modalités de leur répartition.
En conclusion, si l’article 9 de l’ordonnance portant organisation et fonctionnement du gouvernement ne règle le régime de délégation du pouvoir du Premier ministre à un autre Membre du gouvernement, l’article 16 par contre règle la situation d’intérim d’un Premier ministre empêché et non absent.
La sagesse administrative voudrait alors que la loi elle-même délimite ce que doit faire et ne pas faire un intérimaire du Premier ministre. Tel n’est pas le cas dans l’article 16 de l’ordonnance de 2020 voire celle de 2017 portant organisation et fonctionnement du gouvernement. D’où l’application des règles universelles sur l’intérim.
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Me Merphy Pongo
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