Meurtre de deux experts de l’ONU: le procureur canadien pointe du doigt le gouvernement de Kinshasa

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Experts onusiens

« Le succès ou l’échec de l’enquête sur la mort des experts onusiens tués au Kasaï sera congolais, » a déclaré mercredi 5 août à Kinshasa le procureur canadien, Robert Petit.

Ce dernier dirige le mécanisme de suivi sur l’assassinat d’experts des Nations-Unies, Zaida Catalan et Michael Sharp.

Cette déclaration choc a été faite au cours du point de presse bihebdomadaire de la MONUSCO.

 

L’enquête piétine depuis 1 an déjà

Les deux experts de l’ONU ont été tués le 12 mars 2017 près de Bunkonde au Kasaï. Un an après leurs assassinats, l’enquête n’avance pas.

Les conclusions rendues publiques en août dernier ont été décriées par Christoph Vogel, un des collègues de deux experts onusiens assassinés.

 

Complexité du dossier

Le haut fonctionnaire des Nations-Unies qui revient en ce moment de Kananga a souligné qu’il s’agit d’un dossier complexe.

Il a renchérit que sa structure fournit le travail d’appui-conseil à la justice RD-congolaise pour faire la lumière sur les décès de ces experts et leurs accompagnateurs. L’enquête est toujours en cours et le procès a recommencé depuis la semaine dernière.

Une dizaine de miliciens Kamuina Nsapu, présumés auteurs de ces atrocités comparaissent dans ce procès. “Je vais faire de mon mieux pour porter notre expertise et interagir avec la justice RD-congolaise afin que la vérité soit établie,” a souligné le procureur Robert Petit.

 

Le prévenu Kabasele libéré et non pas évadé

L’auditeur militaire supérieur de Kananga représentait le ministère public depuis le début du procès. Curieusement à l’audience de lundi 03 septembre, il a cédé sa place à l’auditeur militaire général de l’armée congolaise, le Lieutenant général Timothée Munkutu arrivé de Kinshasa depuis le 27 août. Le jour même de la reprise du procès.

Dès le début de l’audience, le lieutenant général Timothée Munkutu évoque la situation du prévenu Kabesele dont le tribunal demande des nouvelles depuis la reprise du procès.

Poursuivi dans le cadre de ce procès, il était détenu à la prison de Kananga avec les autres accusés. L’auditeur militaire général révèle que le prévenu a été libéré il y a quelques mois dans le cadre d’une libération de détenus mineurs.

Cette version contredit celle de l’auditeur militaire supérieur de Kananga, le Colonel Bwamulundu, qui avait évoqué devant le tribunal une évasion du prévenu.

Couac: le prévenu Kabasele n’est pas un mineur, selon le tribunal militaire de Kananga qui avait demandé un examen médical.

Le résultat de cet examen a révélé que le prévenu était bel et bien majeur. Malgré cet avis contraire, l’auditeur militaire supérieur de Kananga avait quand même autorisé la libération de Kabasele, a fait savoir le lieutenant général Timothée Munkutu.

L’auditeur militaire général a promu que le ministère public va faire tout son possible pour que le prévenu soit à nouveau devant le tribunal.

 

«Montrer les personnages»

La majeure partie de l’audience du lundi a été consacrée à la confrontation du témoin Jean Bosco Mukanda et du prévenu Bula Bula comme à la précédente audience. Chaque parti a maintenu ses accusations.

M. Mukanda accuse Bula Bula d’avoir dirigé avec le prévenu Vincent Manga la milice qui a exécuté les experts de l’ONU au village Moyo Musuila le 12 mars 2017.

Il maintient sa version selon laquelle il a été arrêté par les miliciens parce qu’il était en communication avec l’armée à qui il dit avoir livré des informations sur la milice.

De son coté, Bula Bula nie tout en bloc. Et ne reconnaît pas son implication dans ce meurtre. Il accuse Jean Bosco Mukanda d’être un chef milicien qui travaillait sous les ordres de Vincent Manga et tenait un cahier dans lequel il rédigeait les rapports de tous les tshiota (foyer initiatique de la milice Kamuina Nsapu) dans la région de Bunkonde.

Les deux s’accusent mutuellement de «mensonges» et des  » contre vérités. »

Le ministre public s’interroge sur qui croire entre les deux: Bula Bula ou Jean Bosco.

Est-il que selon le procureur en charge du dossier ces confrontations vont permettre de «montrer les personnages» impliqués dans cette affaire.

Selon le procureur, cette affaire est très complexe et demandera du temps pour son parvenir à la vérité.
«Ce n’est pas un dossier facile que nous pouvons évacuer dans une semaine. Nous prendrons tout le temps qu’il faudra», promet le lieutenant général Munkutu.

 

La requête de liberté provisoire pour Bula Bula débouté

Le tribunal a aussi rendu sa décision sur la requête introduite au cours de l’audience précédente par l’avocat de Bula Bula qui réclame la liberté provisoire pour son client.

Me Trésor Kabangu estime que la détention de son client est irrégulière, expliquant qu’il n’existait pas d’acte de détention de Bula Bula.

Le ministère public a allégué pour sa part qu’il a été difficile de mettre la main sur Bula Bula et que les faits qui lui sont reprochés sont très graves.

Il estime qu’il ne serait donc pas possible de lui accorder une liberté provisoire. Le tribunal a ainsi rejeté la requête du prévenu qui va donc rester en détention.

Pour rappel, les deux experts, la Suédo-chilienne Zaida Catalan, 36 ans, et l’Américain Michael Sharp, 34 ans,enquêtaient sur des fosses communes. Ils ont été tués par des miliciens Kamuina Nsapu, selon le gouvernement congolais qui affirme tout ignorer de leur déplacement.

En décembre 2017, une enquête de deux journalistes présents dans le Kasaï au moment des faits pour Radio France Internationale (RFI) et l’agence Reuters, indiquait que des agents de l’État congolais avaient participé à l’organisation de leur mission.

 

Thierry Bishop Mfundu

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