La publication des résultats des examens d’État 2 semaines après les épreuves constituent un exploit à mettre à l’actif du ministère de l’EPS. Et cela grâce au contrat que ce ministère a conclu avec les différents sociétés des télécoms de la place.
Pourtant, l’Observatoire de la Dépense Publique (ODEP) estime que la publication de l’examen d’État en RDC fait l’objet d’un contrat des dupes depuis des années.
Au regard de ce qui est produit comme revenu déclaré, cette structure indique qu’il est difficile de faire une contre-expertise. D’après l’ODEP, il s’agit d’une charge de trop pour les parents alors que tous les résultats peuvent être orientés sur le site du ministère de l’EPS. Cela permettre de réduire la charge des parents et faire d’énormes économies.
Capsud.net s’est penché sur le plaidoyer de l’ODEP:
Le Ministère de l’EPS (à l’époque de l’EPSP) signe en 2006 un partenariat avec la société télécom Vodacom et lui cède l’exclusivité de la publication des résultats des examens d’État. Ce qui était auparavant l’apanage de l’inspection nationale.
Il était question d’accélérer la publication de ces résultats qui autrefois prenait des mois entiers.
S’agissant de la répartition de la cagnotte issue de ce partenariat, l’ancien Ministre Maker Mwangu a déclaré que les recettes issues de cette opération étaient divisée en 3 parties. 50% réservé au trésor public, 12% au Ministère de l’EPSP et 38% confiés au diffuseur.
Il répondait ainsi à une question de la société civile lors de la revue des dépenses de l’EPSP en 2014.
Après son départ du ministère, le nouveau ministre Gaston Musemena signe un protocole d’accord en 2017 avec les sociétés des télécoms. Il est question pour lui de permettre accès aux résultats à toute la population congolaise.
Il rompt ainsi le contrat d’exclusivité auparavant conclu avec une société. Et ce, sans pour autant l’évaluer.
Comment peut-on rompre un contrat sans connaitre ses tenants et aboutissants ? Oui, cela est possible en RDC.
Combien rapporte-t-il exactement ces contrats au gouvernement congolais?
Une moyenne de 500 000 élèves finalistes ont passé les examens d’État entre 2008 et 2018. Pour visionner les résultats, il faut débourser 50 unités qui évaluent à une valeur de 0,50$, soit 900 CDF.
Parmi les plus concernés par ces résultats, il n’y a pas que les élèves. Il y a aussi : les parents, les membres de famille et d’autres abonnés. Tous consultent les résultats au moyen d’un SMS.
Le nombre des participants au cours de l’édition 2016-2017 a été de 632 710. Tous ces candidats ont déboursé 569 439 000 CDF ou l’équivalent de 392 175,61 USD.
Si l’on ajoute par exemple un membre de famille pour chaque candidat, on aura 784 351,22 USD.
La somme totale des candidats finalistes pour l’édition 2017-2018 est de 678 348. Ils étaient répartis dans 1 964 centres d’examen d’Etat.
Si on s’en tient à cet effectif, l’ensemble de candidats va payer 610 513 200 CDF ou 336 667,69 USD. En ajoutant un membre de famille par cas, le fonds perçu pour cette opération sera évalué à 673 335,38 USD par société de télécommunications.
A ce montant, si on s’en tient à la participation moyenne de 600 000 candidats entre 2010 à 2018, l’opération a déjà rapporté 5 386 683,04 USD pendant 8 ans pour une société de télécom.
En 2017, la société Vodacom Congo annoncait avoir mobilisé 740 000 USD pour le compte du Gouvernement congolais à partir des services de messagerie SMS, pendant une période de cinq ans.
Un montant jugé insignifiant quand on sait l’engouement et la rapidité des élèves à consulter leurs résultats d’Exetat.
Il y a donc, dichotomie entre les chiffres donnés par Vodacom et la réalité des montants perçus.
Pas moyen d’établir une contre expertise
Il y a une difficulté notoire à établir une contre expertise au regard de la légèreté dans laquelle les différents contrats ont été élaborés. Mais aussi les chiffres et les montants qui y sont remportés du côté de l’EPS et des sociétés des télécoms. Chacun y va de son profit.
Le Ministère de l’EPS ne disposant pas de moyen pour avoir les statistiques réelles des personnes qui consultent les résultats d’examen d’État. Les bases de taxation telles que fournies par les sociétés de télécoms sont erronées. Elles créent un manque à gagner énorme à l’Etat congolais.
Pourtant en 2015, la DGDA avait préconisé un audit du secteur de télécoms. Elle aurait permis au Gouvernement de bien négocier ce contrat et d’y voir un peu plus claire. Ainsi, l’État congolais est le dindon de la force.
Quand on sait que ce fonds pourrait aider à la prise en charge de la question de la gratuité de l’enseignement. Il facilitera notamment la construction des écoles, des frais des imprimés, etc.
Mais curieusement, l’État ne récupère que les miettes de ce qu’on peut qualifier de » contrat des dupes. »
De la passation du marché au contrat: tout est opaque
La signature du premier contrat entre le Gouvernement et la société Vodacom Congo est intervenue en 2006, avant l’adoption et la promulgation de la Loi n°10/010 du 27 avril 2010 relative aux marchés publics. Cela veut dire que le Ministère de l’EPSP s’était référé à l’Ordonnance Loi n° 69/054 du 5 décembre 1969.
Au lieu d’évaluer le premier contrat, le Gouvernement a décidé de l’étendre à d’autres sociétés de télécoms.
Au passage, il foule aux pieds la réglementation en matière de passation des marchés publics.
On peut citer notamment: l’absence de publicité de l’appel d’offre, de transparence de la procédure de passation de ce marché.
Cela pose un certain nombre de problèmes. Il y a notamment celui de non-respect de la Loi relative à la passation des marchés publics en RDC.
C’est pourquoi l’ODEP se demande comment l’Etat peut-il confier une telle opération à des sociétés privées qui ont vocation de faire des profits?
Pourtant le site Internet du Ministère de l’EPS publie déjà les mêmes résultats. Ceux-ci peuvent être téléchargés à un moindre coût, soit 200 CDF.
Les écoles à leur tour pourront rendre disponibles ces résultats aux élèves.
Pourquoi ne pas réviser ou résilier ce contrat ?
Pour éviter toute ambiguïté, l’ODEP demande au Gouvernement de mettre en application les réformes prévues dans le secteur des Finances Publiques. Ces dernières lui permettront afin d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement.
Ainsi, le gouvernement peut prévoir la tenue de la comptabilité budgétaire. Celle ci à l’avantage de permettre de retracer les opérations de recouvrement des recettes et paiement des dépenses, etc.
C’est une disposition prévue par la Loi n°11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques en son article 198. Cette Initiative va d’ailleurs instaurer la transparence dans la gestion des finances publiques en RDC.
Les parents, première victimes de ce contrat
Toutes ces charges retombent sur les parents qui doivent payer un peu plus que prévu. Le paiement de consultation des examens d’État par les parents n’est pas logique constitue une double charge.
Ils payent déjà les frais de participation à ces épreuves. Cet argent couvre trois étapes : la préparation, le passage et la proclamation.
A quoi servent ces suppléments? Pourtant, une partie des dépenses sont couvertes par l’Etat congolais.
Thierry Bishop Mfundu