Il est loisible de noter qu’à la veille des grands enjeux politiques, surtout la tenue des élections, les démons de la division ne tardent pas à refaire surface. La contestation de la nationalité des candidats, surtout ceux éligibles à la magistrature suprême reprend de plus belle manière. C’est ce qu’on peut appeler la quête de la « Congolité » des candidats président de la République.
D’emblée, il faut noter que la question de la nationalité congolaise fait l’objet de débat récurrent et, est considéré comme une des causes des conflits qui secoue l’Est de la RD Congo.
L’accession à la magistrature suprême est depuis un moment convoité par plusieurs congolais parmi lesquels on retrouve Moise Katumbi. Mais ce dernier est accusé -à tort ou à raison- d’avoir obtenu plusieurs nationalités, dont la nationalité italienne en 2000 à laquelle il a renoncé en Janvier 2017 (révélation faite par Jeune Afrique).
Alors que l’article 72 de la constitution stipule que nul ne peut être candidat président de la république s’il n’est pas congolais d’origine, l’article 10 renforce encore cette disposition en instituant L’unicité et l’exclusivité de la nationalité congolaise.
Qui est alors congolais d’origine ? Comment perd-il cette nationalité ? Comment peut la recouvrir ?
La nationalité congolaise est une et exclusive c’est-à-dire qu’elle ne peut pas être détenue concurremment avec une autre nationalité. Ainsi donc, lorsqu’un congolais d’origine acquiert une nationalité étrangère il perd automatiquement sa nationalité congolaise d’origine.
Cette nationalité congolaise d’origine est reconnue dès la naissance de l’enfant en tenant compte de deux éléments de rattachement de celui-ci vis-à-vis de la RD Congo. Il s’agit là de la filiation de l’enfant à l’égard d’un ou de deux parents congolais (Jus sanguinis). Concrètement, on est congolais par le Jus sanguinis (Droit du sang) lorsqu’un de deux parents ou les deux sont eux-mêmes congolais d’origine.
Mais on l’est aussi de l’appartenance aux groupes ethniques dont les personnes et territoires constituent ce qui est devenu le Congo aujourd’hui (on parle alors du Jus soli). En d’autres termes, on est congolais par le Droit du sol (Jus soli) lorsque l’un de deux parents ou les deux appartiennent aux ethniques ayant habité le Congo avant l’indépendance. On peut également se prévaloir être congolais d’origine par le droit du sol lorsqu’on est né sur le sol congolais.
Comment perd-on la nationalité congolaise d’origine ?
Toute personne de nationalité congolaise d’origine qui acquiert une nationalité étrangère perd automatiquement la nationalité congolaise (article 1 et 26 de la loi sur la nationalité).
Comment recouvrir cette nationalité congolaise d’origine ?
Tout congolais d’origine qui a perdu sa nationalité, peut la recouvrir par la déclaration et d’avoir acquis avec la RD Congo ces liens manifestes. Et cette déclaration n’a d’effet qu’à compter du jour de son enregistrement.
Selon l’article 32 de la loi sur la nationalité, le recouvrement de la nationalité par déclaration doit obéir aux conditions de forme. C’est-à-dire, elle doit être présentée en double exemplaires comportant l’élection du domicile en RD Congo de la part de l’intéressé, sa signature légalisée, (…).
Cette déclaration doit être adressée au Ministre de la justice par lettre recommandée avec accusé de réception ou par contre récépissé après remise des pièces requises.
Quant aux conditions de fond : le congolais d’origine qui avait perdu la nationalité congolaise et qui veut la recouvrir doit prouver avoir conservé avec la RD Congo des liens manifestes (sentiment familial, d’ordre économique…Article 32).
Toutefois, le gouvernement peut s’opposer au recouvrement de la nationalité congolaise de l’impétrant pour indignité (Article 33).
Une telle décision du gouvernement peut faire de ce congolais d’origine un apatride voilà pourquoi une telle décision est attaquable devant la cour constitutionnelle ou l’impétrant peut soulever l’exception d’inconstitutionnalité.
La preuve de la nationalité d’origine s’établit en produisant un certificat de nationalité régulièrement délivré par le ministre de la justice. Ce certificat fait foi jusqu’à la preuve du contraire.
Moïse Katumbi, le risque d’apatridie
Eu égard à ce qui précédé, la « congolite » de Moise Katumbi pose problème. Ayant obtenu en 2000 la nationalité Italienne, il a d’office perdu sa nationalité congolaise d’origine et donc il est inéligible aux futures élections présidentielles.
Toutefois, sa « congolite » peut-être recouverte au cas où après avoir renoncé à la nationalité Italienne en janvier 2017, ce dernier aurait fait une déclaration de recouvrement de la nationalité conformément aux conditions de fond et de forme. C’est seulement dans une telle hypothèse que sa candidature est éligible aux futures élections présidentielles.
Au cas contraire, il serait grand temps qu’il arrête avec des justifications aléatoires et qu’il dépose sa déclaration de recouvrement de la nationalité congolaise d’origine. Car le seul fait que sa déclaration soit enregistrée aux services courriels du ministère de la justice suffit pour qu’il redevienne congolais d’origine et éligible (article 72 de la constitution) aux futures élections présidentielles.
Merphy Pongo