Les relais communautaires fournissent traitement et diagnostic pour le paludisme, la pneumonie et la diarrhée aux enfants de moins de 5 ans vivant dans la province de Tanganyika en République démocratique du Congo, une région rurale où l’accès aux soins est rendu difficile par le manque de moyens de transport.
Les larmes ont cessé de couler dans la province de Tanganyika. Dans l’une des plus récentes des provinces située dans le Sud-est de la République démocratique du Congo (RDC), le programme OMS pour l’élargissement de l’accès rapide (RAcE) a repris l’avantage dans le combat contre 3 maladies qui sont à l’origine de 42 % des décès chez les enfants de moins de 5 ans : le paludisme, la pneumonie et la diarrhée. Sur le chemin du retour après une journée passée aux champs, les travailleurs agricoles n’entendent plus les pleurs des endeuillés, mais les jeux bruyants des enfants qui passent devant la hutte de l’agent de santé communautaire et se font peur en évoquant les piqûres qui les attendent en cas de bêtise.
Les chefs de village indiquent que les contributions des agents de santé communautaires, que l’on appelle ici les « relais communautaires », sont au fondement du succès du programme RAcE, qui a donné accès aux traitements dont on avait désespérément besoin pour combattre ces maladies qui tuent rapidement les enfants.
Les habitants de la province vivent dans des zones isolées où l’accès aux soins est rendu difficile par le manque de moyens de transport, les obstacles naturels et physiques et la pauvreté. Les pistes en terre qui y conduisent sont creusées de profondes ornières, durcies et couvertes de poussière pendant la saison sèche et dangereusement glissantes pendant les 2 saisons des pluies. Ces voies sont difficiles à emprunter non seulement pour la plupart des piétons, mais aussi pour les « taxis », ces bicyclettes et cyclomoteurs à l’arrière desquels se hissent des passagers en équilibre instable.
Les familles sont pauvres et tributaires de l’agriculture de subsistance : elles ont trop peu d’argent pour se payer des traitements dans les centres de santé. Et il y a d’autres obstacles encore. Dans certains cas, les seules routes existantes traversent les habitats d’animaux sauvages comme les léopards ou les lions, ou encore des rivières infestées de crocodiles.
Diagnostic, traitement et orientation au sein de la communauté
Dans ce contexte, le paludisme, la pneumonie et la diarrhée ont causé de lourdes pertes chez les enfants de moins de 5 ans, une population très vulnérable pour qui l’absence de traitement est souvent synonyme de décès. En 2012, Affaires mondiales Canada a fourni une généreuse subvention à l’OMS pour qu’elle crée RAcE, un programme chargé de collaborer avec le Ministère de la santé publique pour que les villages isolés aient accès aux traitements par une stratégie connue sous le nom de « prise en charge intégrée des cas dans la communauté ».
Des bénévoles comme Pascaline, 42 ans, sont sélectionnés et suivent une formation pour diagnostiquer et traiter correctement les enfants ou les orienter vers les services compétents. Après avoir accueilli sa jeune mère avec un sourire aussi chaleureux que le soleil équatorial qui baigne le toit de paille de sa hutte, Pascaline réalise un diagnostic sur un enfant de 18 mois, Elessa, à l’aide d’une liste de contrôle étape par étape et d’outils simples comme un ruban (pour la détection de la malnutrition) et un test de diagnostic rapide (pour confirmer ou infirmer le paludisme). Elle administre ensuite la première dose de combinaison thérapeutique à base d’artémisinine (CTA), puis explique à la mère quand administrer la suite du traitement, quels dosages appliquer et comment utiliser une moustiquaire. Elle fixe enfin un rendez-vous de suivi.
Ces médicaments de qualité sauvent la vie des enfants. Chaque traitement efficace incite la population à se détourner des méthodes traditionnelles dangereuses (purges, remèdes « maison », sorcellerie) et à ne pas acheter les médicaments bon marché et inefficaces qui sont vendus dans les pharmacies de fortune. Depuis que son village a accueilli 3900 nouveaux habitants fuyant le conflit qui sévit dans le nord du pays, Pascaline voit entre 50 et 60 enfants chaque mois, soit 2 fois plus qu’auparavant.
Pascaline fournit un service inestimable à sa communauté. Ses enfants et son mari l’aident dans ses tâches ménagères ou lorsqu’il faut aller chercher les commandes de médicaments, de tests de diagnostic ou de gants en latex. Le chef Gérard Kalunga, dont le village en plein développement est perché sur une montagne au-dessus du Lac Tanganyika, a choisi de faire appel aux services de Pascaline pour s’acquitter de sa responsabilité de protection et de soins à la population.
Esprit d’équipe
Avec le Nigéria, la RDC supporte 40 % du fardeau mondial du paludisme, tant en nombre de cas qu’en nombre de décès. Les médecins et les experts de la santé publique de la province de Tanganyika soutiennent activement RAcE par l’intermédiaire de points focaux désignés. Le Comité international de secours, une organisation non gouvernementale qui travaille déjà sur des programmes communautaires et des initiatives en faveur de la santé de la mère et de l’enfant dans cette province, a été sélectionné pour seconder le Ministère provincial de la santé publique.
Avec l’aide des points focaux RAcE, le Comité international de secours forme les agents de santé communautaires et assure un suivi et un mentorat réguliers, ce qui est un élément déterminant dans le succès des programmes. À chaque niveau, les membres ont évoqué l’esprit d’équipe sur lequel repose leurs efforts de collaboration.
Le Ministère de la santé publique de la RDC, avec l’appui technique et les orientations de l’OMS, intègre les enseignements tirés du programme RAcE et met en œuvre une prise en charge intégrée des cas dans la communauté (PEC-C) au plan national, en collaboration avec les autres partenaires qui luttent contre le paludisme et la charge de morbidité qui lui est associée. Le Ministère a utilisé la stratégie de PEC-C dans d’autres provinces et identifié les ressources nécessaires pour élargir la programmation à l’échelle du pays. Le Dr Kalume Tutu, qui pilote la Direction de la Santé de la Famille et des Groupes spécifiques, explique que RAcE et la stratégie de PEC-C sont « exactement ce que nous cherchions pour renforcer nos efforts. Nous avons adopté cette solution « magique » pour sauver nos enfants, pour ne plus nous trouver de nouveau endeuillés ».