Conférence de Genève : la RDC est elle réellement soucieuse de sa population ?

share on:
Diplomatie congolaise

Le refus de la RDC de participer à la conférence de Genève prévue le 13 avril prochain laisse perplexe plusieurs personnes.

 

Au cours de cette conférence, l’ONU et l’Union européenne (UE) projettent de mobiliser 1.7 milliards de dollars pour aider la RDC. Ces montants sont ceux réclamés par les humanitaires pour répondre aux multiples crises humanitaires en RDC.
Et curieusement, la RDC malgré son état humanitaire catastrophique s’y oppose.
Pour beaucoup, cette situation paraît plus grotesque d’autant plus que la population est déjà appauvrie et son état ne cesse de se détériorer. Mais pourquoi le Gouvernement refuse-t-il cette donation ?

 

Le gouvernement refuse un cadeau empoisonné

 

Le Gouvernement congolais déplore le fait qu’il n’a pas reçu des réponses appropriées aux préoccupations légitimes soulevées lors de la réunion du Groupe technique de travail du 27 mars 2018 qu’il a eue avec ses partenaires humanitaires.
En effet, le Gouvernement congolais s’est basé sur la résolution 46/182 du 19 décembre de 1991 de l‘Assemblée générale des Nations Unies sur le renforcement de la coordination de l’Aide humanitaire d’urgence en ses points 2, 3 et 4. Selon cette résolution, « l’Aide humanitaire doit être fournie conformément au principe d’humanité, de neutralité et d’impartialité. » Et de noter que « la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’unité nationale des États doivent être pleinement respecter en conformité avec la Charte des Nations Unies. »
Pour justifier également sa position, le Gouvernement congolais s’appuie sur la Convention de l’Union africaine sur la protection et l‘assistance des personnes déplacées en Afrique dont la RDC est signataire.

Fort de ces argumentations, le Gouvernement congolais a constaté l’absence de mission conjointe Gouvernement-Acteurs humanitaires pour l’évaluation et la validation des données mises sur place publique. Contrairement au chiffre de 4 500 000 déplacés internes, le gouvernement avance un chiffre total de 241 346 personnes déplacées internes dans 69 sites répertoriés sur toute l’étendue du territoire national.
Il est aussi question de la non-communication au Gouvernement par les organisateurs des termes de référence de la Conférence de Genève.
Il y a aussi l’absence d’un plan harmonisé d’utilisation des fonds à collecter lors de cette conférence.

 

Les personnalités montent au créneau

 

Plusieurs personnalités du monde politique et de la société civile sont montées au créneau pour dénoncer cette attitude irresponsable.

Pour le cardinal Mosengwo,  » on ne peut pas refuser une aide quand on a les mains vides »
Il a fait cette déclaration après la célébration de la messe de miséricorde dimanche 8 mars au Centre Lindonge.

Le Docteur Denis Mukwege, a estimé samedi dernier que le refus de Kinshasa de participer à une conférence des donateurs est un manque d’amour des dirigeants congolais pour la population.
Il l’a dit face à la presse lors de la visite du commissaire européen à l’aide humanitaire Christos Stylianides, au Sud-Kivu. Denis Mukwege a souligné que vu l’état des malades, ce refus pour lever des fonds en faveur des déplacés en RDC est « un nouveau scandale».

Selon lui, cette aide est d’une grande importance parce qu’il y a des gens au Kasaï qui ont tout perdu, une famine annoncée, avec des dizaines de milliers d’enfants affamés, les villages détruits en Ituri.
« Si le gouvernement congolais en plus de cela, refuse à la communauté internationale de lever des fonds pour aider sa population, c’est tout à fait criminel », a t-il ajouté.

Dans sa lettre à Antonio Guterres, Sindika Dokolo a aussi dénoncé cette attitude du Gouvernement congolais.

L’initiateur du mouvement « Les Congolais debout » ne mâche pas ses mots. Il parle d’une « décision » qui « relève d’une politique absurde, coupable et cruelle qui conduit à la mort de millions de Congolais. Il évoque le sort des milliers de Congolais qui ont fui leur pays pour trouver refuge, notamment, en Angola.
Tout au long de son courrier, Sindika Dokolo s’attache à décrire le sort de millions de Congolais qui vivent aujourd’hui dans la misère la plus totale. Une situation inacceptable qui rend encore plus incompréhensible la position du pouvoir illégitime en place à Kinshasa de refuser toute aide internationale.
Une « attitude » qui « indigne la conscience universelle. Elle caractérise l’abandon délibéré d’un peuple en danger. Le gouvernement de la RDC est devenu un contre-sens, un contre-Etat. Au lieu de porter secours aux plus vulnérables de nos concitoyens, il a fait le choix de les sacrifier. Ce faisant, il a définitivement perdu la lumière de l’estime publique. »
Sindika Dokolo insiste aussi sur le fait que cette politique du gouvernement congolais ne fera qu’accroître le risque d’une explosion de violence que tout le monde redoute. « Insensible aux souffrances des Congolais, le pouvoir de Kinshasa risque de créer une haine profonde dans le coeur de millions d’hommes, de femmes et d’enfants qu’il sacrifie délibérément sur l’autel de calculs politiques obscurs, », écrit-il.

Bien que les Nations Unies ont promis de déclasser la RDC du niveau le plus élevé de l’échelle de besoins humanitaires (L3) le 20 avril 2018. Annonce faite jeudi dernier par le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA).

Mark Lowcock, sous-secrétaire des affaires humanitaires et coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU, a expliqué que les objectifs de l’activation du statut L3 ont été largement atteints notamment dans trois provinces. Ce qui oblige sa désactivation.
La RDC maintient toujours sa non participation. Cette fois-ci, la population n’attends plus les explications mais la nourriture, l’eau, les soins de santé et l’éducation.

 

Thierry bishop Mfundu

Leave a Response

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.