Et la cour constitutionnelle tomba dans l’inconstitutionnalité

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Il est un fait que le droit constitutionnel suppose : les gouvernants sont considérés comme des hommes ordinaires soumis au droit comme le sont les citoyens. Ainsi à l’instar des cours et tribunaux ordinaires qui sont appelés à sanctionner les comportements antisociaux des citoyens, il est apparu nécessaire aux Etats de concevoir l’idée d’une justice constitutionnelle. Celle-ci, destinée à contrôler les institutions politiques.

 

Étant entendu que le droit constitutionnel est cette partie du droit qui réglemente les institutions politiques de l’Etat, il est primordial pour tout pouvoir qui se veut respectueux des principes légaux de gestion de la Respublica de se doter « urgemment » d’un organe régalien en la matière.

Pourtant, la Cour constitutionnelle congolaise n’a connu son installation effective qu’en 2015 soit 9 ans après la promulgation de la constitution. Pendant ces 9 ans, on recourait encore à la Cour suprême de justice faisant office provisoire de la cour constitutionnelle.

Mise en place, bien que tardivement, la Cour constitutionnelle congolaise est composée de neuf membres. Ceux-ci sont nommés par le président de la république. Mais leur cooptation dépend de trois autorités en raison de trois membres par autorité.

Trois membres sont nommés sur initiative du parlement réuni en congrès, première autorité. Trois autres membres, sont choisis sur initiative du président de la république, deuxième autorité. Et enfin, trois membres sur initiative du Conseil supérieur de la magistrature, troisième autorité.

Notons d’emblée que ces neuf membres ne sont pas des magistrats de carrière sauf ceux provenant du conseil supérieur de la magistrature.

Les membres de cette cour sont nommés pour un mandat de neuf an non renouvelable. Toutefois, la cour constitutionnelle est renouvelable par tiers tous les trois ans. Lors du renouvellement, il sera procédé au tirage au sort d’un membre par groupe.

 

Quelles garanties pour les juges constitutionnels ?

 

 

Les juges constitutionnels bénéficient d’un ensemble des garanties dans l’exercice de leurs fonctions. Ces garanties sont à la fois personnelles et organiques.

Il s’agit des garanties statutaires organisant l’indépendance et la dignité du juge. Notamment dans l’exercice de ses fonctions au sein de la juridiction constitutionnelle.

Le juge constitutionnel congolais se trouve être placé face aux pouvoirs politiques. Son action dépend des garanties conférées tant à l’organe qu’aux membres.

Au surplus de l’effectivité de l’Etat de droit se mesure au sort quotidien réservé aux décisions du juge constitutionnel congolais. Et cela non seulement au regard de l’environnement politique congolais. Mais aussi en fonction de la société congolaise très chaude et sensible aux questions de l’Etat.

C’est dans cet objectif que le constituant congolais de 2006 et le législateur de 2015 soucieux de construire l’Etat de droit ont aménagé une indépendance du juge. Cette indépendance organique personnelle du juge constitutionnel lui permet de s’affirmer et la société congolaise lui réserve un sort favorable.

 

 

Comment la cour constitutionnelle est-elle tombée dans l’inconstitutionnalité ?

 

Il est loisible de noter que l’article 158 de la constitution stipule que « la Cour constitutionnelle est renouvelée par tiers tous les trois ans.Toutefois, lors de chaque renouvellement, il sera procédé au tirage au sort d’un membre par groupe. »

L’article 6 de la loi organique de 2013 sur l’organisation et le fonctionnement de la cour constitutionnelle complète « Le mandat des membres de la Cour est de neuf ans. Il n’est pas renouvelable.

La Cour est renouvelée par le tiers tous les trois ans. Lors des deux premiers renouvellements, il est procédé au tirage au sort du membre sortant par groupe pour les membres initialement nommés. »

En effet, les neufs membres de la cour constitutionnelle ont été installés officiellement le 04 mars 2015.  Leur prestation de serment eut lieu devant le parlement réuni en congrès. Logiquement le 04 mars 2018, la cour constitutionnelle devrait être renouvelée par tiers en tenant compte du tirage au sort du membre par groupe.

Concrètement, depuis le 04 mars 2018, un tirage devrait être effectué par groupe. Le groupe de 3 juges nommés sur proposition du président de la république. Le groupe de trois juges nommés sur proposition du conseil supérieur de la magistrature. Et enfin, le groupe de 3 juges nommés sur proposition du parlement.

A la fin de ce tirage, un membre par groupe devrait être tiré pour être remplacé. En d’autres termes, depuis le 04 mars 2018 trois juges (sur base d’un juge par groupe) devraient être parti de la cour constitutionnelle. Et ceux-ci immédiatement remplacés par trois nouveaux juges (un désigné par le président de la république, un désigné par le conseil supérieur de la magistrature et un autre désigné par le parlement).

Malheureusement, ce processus de renouvellement et de remplacement n’a pas été amorcé à temps conformément à la constitution.

 

Conséquences juridiques ?

 

Le non renouvellement de la cour constitutionnelle par tiers comme l’exige l’article 158 de la cour constitutionnelle, rend la composition de cette dernière irrégulière et illégitime. Et par conséquent, la cour constitutionnelle ne peut plus se prévaloir la qualité du juge du contentieux électoral, de l’interprétation de la constitution ou de la constitutionnalité de la loi. Et tous les actes juridiques posés par une telle composition sont des « actes inexistants » et n’auront aucun effet juridique.

 

Merphy Pongo

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